la croûte
je suis les empreintes de tes pas
tes deux pieds fossiles dans la terre grasse
tes calots calqués, poussières de surface
tes talons lancés comme des coups de grâce
je suis la route que creuse tes pas
en calant mon pied dans ton pied creusé
en foulant la terre de la même foulée
que celle qui nous espace
si je perds ta trace dans le sable d’une plage
dans l’eau d’une rivière, la poussière des crues
j’interroge les sages, les mages et les pages
et jusqu’au dernier chien, oui, pourvu qu’il t’aie vu
et peu importe, au fond, que je te trouve ou pas
je te sais si proche, je te touche du doigt
là, à portée de bras, à portée de terre
j’attrape ta voix dans les courants d’air
tu suis ton chemin, et moi je te suis toi
je ne me coucherai pas en travers de ta route
quand il pleut sur ta tête, je passe entre les gouttes
nos semelles se mêlent et c’est bien comme ça
quand tu en auras marre, tu t’arrêteras
je te rejoindrai, je ne te dirai rien
j’aurais sous les pieds une croûte de toi
et c’est comme ça que tu me reconnaîtras